« En bas de chez moi, il y a une agence de voyages ; je passe chaque jour devant cet étrange bureau plongé dans la pénombre. L’une des employées sort souvent fumer devant la boutique, et demeure quasiment immobile en regardant son téléphone. Il m’est arrivé de me demander à quoi elle pouvait penser ; je crois bien que les inconnus aussi ont une vie. Je suis donc sorti de chez moi en me disant : si elle est là en train de fumer, elle sera l’héroïne de mon roman. »
« Je n’eus d’autre choix que de m’aventurer seul vers le salon. Comme à chaque fois que j’étais invité chez quelqu’un, je regardai la bibliothèque. J’ai l’impression qu’on peut tout savoir d’une personne en observant les livres qu’elle possède. A l’époque où je cherchais à acheter un appartement, je me dirigeais directement vers les étagères, en vue de découvrir les romans qui s’y trouvaient. S’il n’y en avait pas, je quittais aussitôt les lieux. Il m’était impossible d’acquérir un bien dont les précédents propriétaires ne lisaient pas. C’était comme apprendre qu’un crime horrible avait eu lieu au même endroit des années auparavant (chacun ses excès). De la même manière que certains croient aux revenants, je juge tout à fait crédible qu’il puisse exister une sorte de fantôme de l’inculture. »
J’ai découvert David Foenkinos quand j’avais une dizaine d’années, avec la sortie du film la Délicatesse. Ce dernier m’avait donné envie de lire le livre, et de fil en aiguille, j’ai lu tous les romans de l’auteur… et je n’ai pas perdu cette habitude. A chaque sortie, je me précipite à la librairie ! J’ai ouvert La famille Martin sans même lire la quatrième de couverture, pour avoir la surprise jusqu’au bout. Dès les premières pages, j’ai retrouvé l’écriture que j’aime tant de l’auteur…
Un écrivain en mal d’inspiration: c’est décidé, il va s’attacher au réel pour délaisser la fiction. Son prochain livre contera l’histoire d’un inconnu, le premier qu’il croisera. C’est Madeleine Tricot – drôle de nom pour une couturière – dame d’un certain âge. Après lui avoir expliqué son projet d’écriture, c’est toute la famille qu’il rencontre : la famille Martin. L’écrivain aux prises avec la vie réelle, entre dans l’intimité d’une famille dont les aventures seront romanesques…
La plume de David Foenkinos allie avec justesse humour, réalité et fiction. Ce roman a une haute portée philosophique. Alors que nous pensons respectivement, parfois, que notre vie est plate, identique à celle d’autres individus, il nous suffit de prendre le point de vue de l’écrivain pour en faire ressortir son originalité. Cette famille n’a rien de particulier mais en y regardant de plus près, ses aventures sont rocambolesques, romanesques, fantastiques. Un point de vue à adopter pendant le confinement !

