« Cet acte de rébellion muette marqua les premiers pas de Pablo en ce monde, et la nouvelle se répandit bientôt dans Baracaldo que l’enfant des Martin était incapable de pleure. »
« »Je ne suis pas seulement venu te voir, Pablito, je suis aussi venu te demander de collaborer avec nous. – … – Nous avons besoin de gens comme toi. – … – C’est notre avenir et celui de milliers d’Espagnols qui est en jeu. – Mais ça fait des années que tu ne vis plus en Espagne, Robin. – Oui, mais j’aimerais pouvoir rentrer un jour et regarder les gens en face sans avoir honte. Pense à ta mère, pense à ta soeur: est-ce que tu vas les laisser pourrir pendant quand tu es ici sain et sauf ? » »
En tant qu’Exploratrice de la rentrée littéraire avec Lecteurs.com, et pour cette deuxième chronique, voici un livre des plus intrigants : L’anarchiste qui s’appelait comme moi. Je redoutais de ne pas entrer véritablement dans l’histoire, étant donné que je ne me dirige pas naturellement vers ce genre de lectures. J’ai été agréablement surprise par celui-ci ! Un extrait de ma chronique a été mis en avant sur le site de lecteurs.com, et je vous invite, évidemment, à consulter cette page pour découvrir d’autres livres chroniqués par d’autres Explorateurs !
Pablo Martin Sanchez délivre un contexte historique poignant avec ce roman sur la dictature de Primo de Rivera. Il a l’audace d’écrire la vie de cet homonyme trouvé au hasard d’une rencontre internet : un anarchiste qui s’appelait comme lui.
A travers ses six cents pages, ce roman raconte l’histoire de Pablo, devenu anarchiste après une déception amoureuse. Epris d’Angela qu’il recherche à travers l’Espagne, il dépose les armes lorsqu’il la reconnait, en compagnie d’un autre homme, un enfant dans les bras. Mais Pablo n’a pas tout perdu : il retrouve son ami d’enfance. Sous couvert d’un lien fort et d’une promesse d’amitié éternelle faite quelques années plus tôt, il se laisse entraîner dans un autre combat : libérer son pays de la dictature.
La vie de Pablo est jalonnée par des quêtes impulsées par un sentiment de justice exacerbé. L’injustice d’une situation financière instable le contraint à suivre son père. Loin de sa sœur et de sa mère, il s’émancipe alors que son père travaille. L’injustice d’un situs inversus met le jeune garçon à l’écart dès les premiers instants de socialisation avec les autres enfants. Pablo est différent. Il doit apprendre à vivre avec. Viennent les injustices plus cruelles encore : celle de cet amour réciproque condamné par la famille d’Angela ou celle de ce pays tombé entre les mains de la dictature. Pablo se construit sans modèle, au gré de ses actions.
L’ossature de ce roman est double. Deux temporalités nourrissent ce roman à l’équilibre parfait. L’auteur jongle avec aisance, entre un Pablo en 1924, et celui, enfant, de 1890. Ce jeu d’écriture donne les clés d’une compréhension totale de la vie bouleversante de l’anarchiste.
L’anarchiste qui s’appelait comme moi est aussi cruel que troublant. La fin, tragique, met en lumière l’injustice de ce pan de l’Histoire espagnole. On s’attache à ce Pablo, enfant comme adulte, on tremble, on espère, et on prend conscience que ces personnes, tombées dans l’oubli, ont aussi leur histoire à raconter.

