Salomé Kiner, Grande couronne, Christian Bourgeois.

« J’admirais Amanda parce qu’elle avait des vêtements de marque, des produits de beauté de marque et des goûters de marque »

« Maupassant était venu sur terre pour me mettre un coup de pression. Il avait écrit la parure pour me dire que j’avais eu tort de me lancer dans la protistution dans le seul but de l’acheter dès baskets, du maquillage et des CD. »

J’ai chroniqué ce roman qui vient d’obtenir le prix Zadig, il y a quelques temps sur Lecteurs.com puisque j’ai eu le plaisir de le découvrir dans le cadre des Explorateurs…

Salomé Kiner, journaliste, scandalise avec ce premier roman. Elle ancre son roman dans les années 1990. A travers les yeux d’une adolescente anonyme, elle y dépeint une société de surconsommation et décrie ses ravages sur les comportements humains.

Grande couronne raconte l’histoire d’une élève de collège mise à l’écart. Les vêtements sans marque, de seconde main, achetés par sa mère et les goûters premiers prix lui font honte. Les autres de sa classe ont des logos bien connus sur leurs tenues. Le besoin viscéral d’appartenir à ce groupe la pousse à entrer dans un réseau de prostitution. Le mercredi, elle attend ses clients, s’exécute, avant de trouver son salaire au collège, au fond d’un paquet de BN. Sa mère, trop obsédée par son propre divorce, ne remarque pas le changement de sa fille.

L’héroïne, sans nom, apprend à se servir de l’anatomie masculine avant même de la découvrir. Un vocabulaire cru décrit des situations vulgaires. Elles n’ont pas leur place dans la vie d’une adolescente. Les codes de l’enfance sont détournés : les sucettes Chupa Chups deviennent des accessoires pour s’entraîner aux requêtes des clients du mercredi.

Ce roman repose sur une trivialité obscène qui flirte avec une naïveté enfantine. Tous les codes sont rudoyés et plongent l’adolescente dans une ambivalence. Elle n’est plus une enfant, mais pas encore une adulte. Au collège, elle est une bonne élève, avec des rêves d’enfant. Le mercredi, sur ce parking d’une gare, elle est une prostituée, avec des réflexions d’adulte.

Grande couronne est un roman sociologique, plus choquant sur le fond que sur la forme. L’écriture tranchante nous déstabilise. La mode guide sa loi : les jeunes générations en sont victimes. On s’indigne de ce passage au monde adulte en force et on croit en un avenir meilleur pour l’héroïne.

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